Le chômage, c’est bizarre, mais ce mot me donne des frissons, car le vivre sous les tropiques est une chose à ne pas souhaiter à quelqu’un : une vraie canicule pour l’esprit et le corps. Quand j’étais au lycée, j’ai vu plusieurs grands de mon quartier perdre le nord à cause du chômage qui n’avait que trop duré. Certains de mes grand-frères ont également rencontré sur le chemin de leur vie ce mauvais compagnon qui ma foi leur a fait voir de toutes les couleurs. Comme si c’était un karma, aujourd’hui, c’est à mon tour de vivre cette situation.
Après les études, les jeunes diplômés rentrent dans le marché du travail avec beaucoup d’enthousiasme et de détermination pour faire valoir leur savoir-faire que ce soit dans le secteur privé que dans le public. Cet enthousiasme est d’autant plus important lorsqu’on a fait ses études à l’étranger, car on estime y avoir reçu une meilleure formation compte tenu des réalités universitaires au Gabon qui restent encore difficiles.
Opération dépôt des dossiers
Dès mon arrivée au Gabon, je n’ai pas attendu 5 jours pour déposer mes dossiers dans des entreprises sises à Libreville. Dans ma sacoche, une trentaine de demandes de stage et CV pour m’immiscer dans le monde du travail. Sans grande expérience dans mon domaine qui est l’Audit et le Contrôle de gestion, j’ai misé sur le stage pour commencer et compte sur mes performances pour être retenu à la fin de celui-ci. Hormis le dépôt des dossiers dans les locaux mêmes des entreprises listées, j’ai également envoyé par la poste d’autres demandes de stage afin d’augmenter mes chances de réponse. Trois mois plus tard, je conjugue toujours le verbe attendre. Aucune réponse par mail ni d’accusé de réception encore moins un coup de fil.
La période correspondante au dépôt de dossiers dans les entreprises est un véritable parcours du combattant. Sachant que les entreprises sont disséminées à travers la capitale, que les bouchons sont nombreux sur les routes de Libreville sans parler de la cherté et des taxis, c’est en tirant le diable par la queue qu’on parvient à déposer toutes les demandes. Il faut sans aucun doute une grande volonté pour chercher le travail. Tout commence très tôt le matin et finit aux alentours de 13 h – 14 h. Durant ces journées, ce sont des va-et-vient dans différents bureaux, de longues marches dans les rues comme un soldat en mission commando. J’ai rencontré durant ces transactions des amis qui travaillaient dans des régies financières ou dans des sociétés privées. D’autres sous un soleil d’aplomb étaient aussi à la recherche d’un emploi comme moi, avec sur eux une chemise cartonnée remplie de demandes et de CV. C’est le prix à payer quand on n’a pas de « bras longs » dans son entourage.
La vie quotidienne d’un chômeur
Un chômeur n’a pas de sou, c’est un fauché cravaté comme un chef dans les artères de la ville. Il ne reçoit pas d’aide de l’Etat, il vit de petits business et des « dédicaces » de certains parents. Quand j’étais étudiant au Sénégal, je recevais chaque mois de l’argent pour payer mes charges et avais mon argent de poche et ce pendant cinq ans. Une fois rentré au pays cela a été terminé. La raison est toute simple : les parents ont beaucoup dépensé assez quand j’étais à l’étranger dorénavant ce sont les plus jeunes qui doivent en profiter. Ce que je comprends parfaitement, toutefois la rupture est brutale. Comme quoi la vie est une roue qui tourne.
Les difficultés ou galères qu’un chômeur connaît sont supportables lorsque lui seul les subit, mais s’il a un enfant et une fiancée, à ce moment les choses se compliquent pour lui. Il n’est pas aisé de voir son enfant désirer ou manquer de quelque chose et être frappé d’incapacité parce qu’on n’a pas les moyens. Pis encore quand il s’agit de la fiancée, vous-même vous savez comment sont les femmes, elles sont très insistantes quand elles veulent quelque chose ! J’ai maintes fois été victime de ces situations, heureusement que j’ai jusqu’ici réussi à trouver une solution. Jusqu’à quand je pourrais tenir ainsi ? La particularité du chômeur, c’est l’irrégularité de ses revenus, c’est pourquoi beaucoup dépriment au regard des responsabilités qui leur incombent. D’autres plongent dans l’alcool, les femmes et les sorties de nuit sans se soucier du lendemain. Moi, je ne compte pas me laisser faire en dépit des difficultés.
L’initiative privée comme solution
Personnellement, je pense que le chômage n’est pas une fatalité, mais plutôt une source formidable d’inspiration. En période de chômage on a largement le temps de mettre sur papier des idées de projets qui taraudent dans notre esprit. Un pays comme le Gabon regorge de nombreuses opportunités, car presque tout est à faire et à proposer commercialement. Il y a de plus une croissance de la classe moyenne qui a besoin de services divers dans le cosmétique, les vêtements, la restauration, le divertissement, la découverte, les services à la personne, l’agro-alimentaire sans oublier le large éventail d’affaires qu’offrent les TIC, etc. Autant de secteurs qui restent à exploiter. C’est dans l’esprit entrepreneurial que je m’inscris, si l’emploi ne vient pas à moi alors moi j’en créerai. Je crois que tout diplômé à la possibilité et la capacité de créer une entreprise même petite . Nous sommes à une ère qui impose l’innovation et l’initiative privée, rien ne peut empêcher un jeune ambitieux de réaliser son rêve s’il le désire véritablement.
Le travail ou les opportunités de la vie ne se trouvent pas à la maison, mais dehors, il faudrait bouger et chercher les voies et moyens pour sortir du chômage. S’associer avec d’autres personnes qui partagent la même idée de s’auto-employer. Il y a plusieurs institutions financières qui sont prêtes à accompagner des jeunes, avec un peu d’abnégation les choses peuvent aussi marcher pour nous. Je crois fermement en cette option d’auto-emploi c’est pourquoi j’invite chaque chômeur à y songer. L’entrepreneuriat est un bon moyen pour avoir aussi notre place au soleil.
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